En 1985, Michael Pollak initie un programme de recherche sur les bisexuels et homosexuels face au sida. A l'époque, ceux-ci représentent la moitié des cas de sida enregistrés en France, d'où l'intérêt de collecter des informations sur leurs modes de vie en vue d'élaborer des actions de prévention qui leur soient spécifiques. A partir de 1992, suite audécès de Michael Pollack, c'est son assistante, Marie-Ange Schiltz, qui est responsable de l'enquête. Il est important de noter qu'un groupe social minoritaire est toujours difficile à étudier, car l'on se heurte généralement à des problèmes de représentation et de taille de l'échantillon. Les homosexuels forment à l'époque un groupe social minoritaire et stigmatisé, pour lequel les critères d'appartenance ne sont pas visibles. Ces difficultés expliquent le choix de l'enquête répétée, diffusée par voie de presse, qui permet de recruter rapidement et à peu de frais un grand nombre de répondants. Cette recherche se consacre à l'étude de deux problèmes distincts, mais intimement liés, à savoir la gestion de l'identité sexuelle, socialement réprouvée, et l'inquiétude liée au risque de santé qui est renforcée par l'impuissance médicale. En effet, à l'époque, à la perception d'une déviance liée à l'orientation sexuelle était venue s'ajouter l'expérience de la séropositivité et la stigmatisation qui pouvait lui être liée. Afin de concevoir et d'évaluer une politique de prévention adaptée aux bi- et homosexuels masculins il fallait nécessairement connaître les pratiques sexuelles et les représentations sociales de cette population. Les enquêtes Gai Pied Hebdo, puis les enquêtes Presse Gaie forment la pièce centrale de ce programme de recherche. Après l'essor du « safer sex » dans la fin des années 1980, on constate que celui-ci se stabilise, certes à un niveau élevé, mais insuffisant pour éviter de nouvelles contaminations. L'enquête de 1991 s'inscrit dans la continuité du système d'observation mis en place par Michel Pollak. Elle étudie l'évolution des comportements sexuels, avec notamment les précautions prises face au sida, et effectue une comparaison entre l'état du « safer sex » en France et celui des autres pays de la Communauté Européenne. La coordination des chercheurs travaillant sur ces thèmes a permis l'élaboration d'un questionnaire commun sur l'état du « safer sex », du test VIH et de la perception que les homosexuels ont du climat social provoqué par l'épidémie en Allemagne, Autriche, Danemark, Italie, Pays-Bas, Suisse, Royaume-Uni, ainsi qu'en Belgique et en Irlande, où le questionnaire est légèrement différent.
In 1985, Michael Pollak initiated a research programme on the impact of AIDS on bisexual and homosexual people. At the time, the latter accounted for half of the AIDS cases recorded in France, hence the advantage of collecting information on their lifestyles in order to develop prevention measures specific to them. From 1992, following the death of Michael Pollack, it was his assistant, Marie-Ange Schiltz, who headed the survey. It is important to note that it is always hard to study a minority social group, because one generally encounters problems of representativeness and sample size. At the time, homosexuals as a social group were a stigmatised minority, for whom criteria of belonging were not visible. These difficulties explain the decision to conduct repeated surveys, distributed through the press, which made it possible to recruit a large number of respondents quickly and at relatively little cost. This research focused on studying two distinct, but intimately linked problems: the management of a socially frowned upon sexual identity, and anxiety over the health risk, which was reinforced by medical powerlessness. Indeed, at the time, the perception of a deviancy linked with sexual orientation combined with the experience of seropositivity and stigmatisation that could be linked with it. In order to design and assess a policy of prevention appropriate to male bisexuals and homosexuals, it was necessary to find out about the sexual practices and social representations of that population. The Gai Pied Hebdo surveys, and then the Presse Gaie surveys, form the central component of this research programme. After the rise of “safer sex” in the late 1980s, it was observed that while these practices became widespread, the level was insufficient to avoid new infections. The 1991 survey followed the same lines as the system of observation introduced by Michel Pollak. It studied trends in sexual behaviour, particularly precautions taken against AIDS, and made a comparison between the status of “safer sex” in France and in the other European Community countries. Researchers working on these topics joined forces to develop a joint questionnaire on the status of “safer sex”, of the HIV test, and gay people’s perception of the social climate caused by the epidemic in Germany, Austria, Denmark, Italy, Netherlands, Switzerland and the United Kingdom, as well as in Belgium and in Ireland, where the questionnaire was slightly different.